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À seulement sept ans, Arthur est déjà orphelin.
« En disparaissant,
Ses parents lui avaient légué
Une fortune immense
Et un chagrin
D’égale importance.

Le vélo pliable est idéal en ville et pour partir en vacances par exemple.

Son malheur
L’avait rendu riche,
Si riche,
Que tous ses vœux
Pouvaient être exaucés
Pourtant,
L’enfant s’ennuyait. »

On a beau faire venir au manoir clowns, troubadours et musiciens, rien n’y fait. Pas un ne parvient à distraire Arthur.
Malgré l’empressement de son flegmatique majordome à anticiper son moindre désir (le brave est si zélé qu’il semble être à plusieurs endroits au même moment !), le petit garçon n’aime rien mieux que de grimper sur le toit pour regarder les étoiles et rêvasser à la mort, à la vie…

Noël approche. Le premier, depuis la disparition des parents d’Arthur.
Le petit garçon est bien déterminé à ne pas passer tout seul ce moment de l’année magique entre tous. À la surprise générale, il décide de convoquer les morts à sa table. Il espère secrètement recueillir auprès d’eux des informations de première main sur la mort.
Le soir du réveillon de Noël, dans les allées du jardin passe un défilé de corbillards amenant les invités d’Arthur, « dans leurs habits d’enterrement, beaux comme des costumes de fête ».

Mais le petit garçon est déçu ; ses hôtes se montrent peu loquaces et ne touchent pas à leur assiette.
Au cours du repas, l’entrée inattendue de deux visiteurs va créer la surprise :
« Dans un halo de lumière
Deux spectres inattendus
Apparurent alors,
Deux silhouettes familières
Que l’enfant reconnut
Entre tous les morts. »
L’apparition de ses parents, beaux et fringants comme au jour de leur disparition, va apaiser Arthur et soulager sa peine.
Au son des rires de la fête, il s’endort, serein, sachant ses parents tout près de lui.
Morts sans avoir disparu pour autant.

La mort d’êtres chers et leur souvenir sont au cœur de cet Étrange réveillon. Et pourtant le conte co-signé par Bertrand Santini, pour le texte, et Lionel Richerand, pour l’illustration, n’est ni macabre ni triste. Au contraire, tant les mots que les dessins débordent d’humour, d’espérance et de confiance en l’avenir.
D’un côté, la structure et les allitérations du texte de Bertrand Santini sonnent comme une comptine, pleine de poésie et de tendresse.
De l’autre, les illustrations de Lionel Richerand, sombres mais jamais sinistres, donnent toujours matière à sourire. Les rares incursions de la couleur, diffuse, accentuent une expression, un personnage, un détail…

À partir d’un thème grave, difficile à aborder avec un enfant, Bertrand Santini et Lionel Richerand ont bâti un joli conte de Noël bourré d’optimisme et de fantaisie, que l’on referme le cœur léger.
Mieux encore, L’étrange réveillon, dont l’univers flirte avec L’étrange Noël de Monsieur Jack ou Les noces funèbres, de Tim Burton, saura plaire autant aux enfants qu’aux adultes.

La page Facebook de L’étrange réveillon.
Le blog de Lionel Richerand.

Ce qu’ils en ont pensé :

Cederd@le : « Un bel album, je suis d’accord. De très belles illustrations, là aussi je suis d’accord. Mais pourquoi tant de noirceur ? (…) Cela aurait sans doute pu être abordé avec seuls les fantômes des parents… »

Gaëlle : « Quelle audace tant dans les textes que dans les illustrations… J’en suis sans voix. Derrière ce réveillon pas comme les autres, la mort et le souvenir sont abordés de manière profondément justes. Et peu importe l’argent car rien ne vaut l’amour. »

Za : « On aurait évidemment envie de convoquer l’ombre de Tim Burton, tant il semble que les univers crépusculaires lui soient désormais dévolus. (…) Ceci dit, j’ajouterai bien un cousinage avec le Petit vampire de Joan Sfar (…). Mais ce serait réduire l’Étrange réveillon à un rôle d’album sous influence alors qu’il est bien plus que cela. »

L’étrange réveillon, de Bertrand Santini et Lionel Richerand
Grasset jeunesse / Collection Lecteur en herbe (2012) – 48 pages