HUGO_WALERY

Victor Hugo, par le Comte Stanislas Ostorog dit Walery, vers 1875

« T’aimes ça, toé, quand y est comme ça, hein ? » « C’est des affaires qu’on n’entend pas ailleurs qu’ici, moman… » « Heureusement ! Si y fallait que toutes les femmes soyent pognées avec un agrès comme le mien… » « Y fait pas de mal à personne, y récite des poèmes… » « Y pourrait les réciter à des heures plus normales. D’abord qu’y tombera pas dans La fête chez Thérèse ! Ca dure dix minutes pis c’est plate pour crever la bouche ouverte. J’peux ben y décrire un party, moé aussi, pis prétendre que c’est de la poésie ! La fête chez Thérèse ! Pourquoi pas La fête ratée de Victoire, tant qu’à y être ! » « C’en est de la poésie, moman… » « Je le sais ! Aie pas peur, j’me prends pas pour Victor Hugo. Y en a assez d’un dans’ maison » « Des fois j’me dis que chus chanceux. Y’a personne d’autre à mon école qui sait qui c’est Victor Hugo. Y rient de moi, mais ça fait rien ! » « T’es ben le garçon de ton père ! Comme si ça pouvait t’apporter quequ’chose dans’ vie ! En tout cas, si jamais tu t’intéresses encore à la poésie en grandissant, évite la boisson, cher tit’gars… » Elle lui remonte le drap jusqu’au menton. « Ferme ta lumière, là. Tu vas entendre la poésie aussi ben la lumière fermée. Peut-être même mieux. » « Bonne nuit, moman. « « Bonne nuit, cher tit’gars. Rêve pas que t’es Victor Hugo, ça va te donner de mauvaises idées pour ton avenir… »

qui nous propose un petit vélo pliable.

(p. 209-210)

La grande mêlée, de Michel Tremblay
Actes Sud (2012) – 280 pages