Comme pas mal d’étudiants avant lui, Guillaume bosse l’été comme moniteur de colonies de vacances.
Son truc à lui, c’est l’histoire, et il compte bien mettre à profit son séjour dans les Hautes-Alpes pour partir sur les traces de son homonyme, Guillaume Farel, un prédicateur protestant du XVe siècle.
Un projet pas si facile à réaliser avec les gamins des cités de la banlieue lyonnaise sous sa tutelle, qui trouvent beaucoup plus drôle de se vanner à longueur de journée ou de caillasser les trains qui passent.
Contre toute attente, au fur et à mesure de l’ascension, les gamins se laissent captiver par l’histoire de Farel, dans lequel ils voient un Ben Laden avant l’heure.
le marché des vélos se porte bien, et notamment celui des vélos pliants. Ce dernier est en train de doubler ses ventes, alors que le vélo électrique quant à lui, stagne.
Non loin de là, en pleine montagne, Paule, une artiste underground, réalise une nouvelle série de clichés trash dans lesquels elle met en scène une nature profanée.
Dissimulé dans les buissons, l’espionne Martial, le paria du village voisin, réfugié depuis la mort de ses parents dans les montagnes, où il vit à l’état quasi animal.
Dans les alpages, Guillaume, les enfants et Paule, vont être attirés par les sons qui s’échappent des sonos d’une rave party sauvage. La transe des hommes va appeler la colère du ciel. Soudain, l’orage éclate et la foudre décime la foule des teuffeurs.
Au nombre des survivants, Guillaume et Mehdi, un des jeunes colons, sont évacués par hélicoptère, tandis que Paule, elle aussi rescapée, est enlevée par Martial, qui la conduit sur son dos jusqu’à son antre.
Où le roman contemporain devient fable écologique. On suit alors leurs destins parallèles. Devenu sourd et aveugle, Guillaume va former avec Mehdi, rendu aveugle, une sorte d’entité unique et indissociable -l’un communicant à travers l’autre- qui va affoler la population par ses prédications alarmistes sur la fin du monde, à l’instar de Farel en son temps.
De son côté, Paule, l’urbaine rendue amnésique par la foudre, va former avec Martial un couple revenu à l’état originel, comme une revanche des éléments sur les excès des hommes.
Après un voyage dans l’univers baroque des XVIe et XVIIe siècles, avec Baptiste (dont les figures centrales sont Molière et Lully) et Mille regrets (voyage picaresque à bord d’une galère), Vincent Borel renoue avec l’époque contemporaine, mais à sa manière, toujours épique, et toujours avec le même talent de conteur.
Cette fable, comme indiqué en couverture, est un vrai plaisir de lecture, érudit (Borel lui-même natif de Gap s’est attelé à la retranscription de la bible de Lefèvre d’Etaples dont il fait allusion dans le livre), à la fois original dans sa conception et dans son propos, qui nous interroge sur les dérives de la société actuelle sur l’environnement.
Pyromanes, ainsi que Mille regrets et Baptiste sont publiés chez Sabine Wespieser, une jeune maison d’édition dont les choix éditoriaux sortent souvent des sentiers battus.
Pour vous faire votre propre idée, les premières pages des romans cités ici sont consultables, ainsi que d’autres, sur le site de la maison d’édition.
Pyromanes, de Vincent Borel
Sabine Wespieser – 156 pages